COKE EN STOCK : DÉJÀ LES RAVAGES DU POLITIQUEMENT CORRECT

Déjà, il y a 60 ans, même dans les Aventures de Tintin, en 1958, le politiquement correct frappait ! Ainsi, dans la première édition de l’album Coke en Stock, quand Tintin et Haddock quittent la ville, habillés en femmes arabes, lorsqu’ils sont devant la fontaine, après avoir été « dévoilés » par une femme vêtue de noir qui s’adresse à lui en langue arabe, le capitaine Haddock lui hurle dans un accès de colère : « Espèce de Fatma de Prisunic »

Mais en 1967, suite à un virulent article paru dans la revue « JEUNE AFRIQUE », dans lequel Hergé était traité de raciste, de nombreux dialogues ont été modifiés. C’est ainsi que dans les éditions suivantes le texte est devenu Bayadère de carnaval

REPRENONS LA CHRONOLOGIE

ETAPE 1 : en 1957, lors de la prépublication dans le journal Tintin, il est écrit « Fatima de Prisunic », (sans doute une erreur de lettrage passée inaperçue lors de la prépublication : Fatima au lieu de Fatma, peut-être le lettreur Arsène Lemey pensait-il à  la Vierge de Fatima, quatrième lieu des pèlerinages catholiques au monde)

 

ETAPE 2, Lors de la sortie de l’album couleurs, en 1958, Hergé corrige et remplace par « Fatma de Prisunic » plus justifié que Fatima, car Fatma signifie en langage courant femme musulmane (expression un peu péjorative, je vous l’accorde)

 

 

ETAPE 3, suite à l’article de « Jeune Afrique » en 1967 qui pousse des cris d’orfraie, Hergé remplace le terme par « Bayadère de Carnaval ».

Il en profite également pour supprimer « Prisunic » sans doute pour ne pas avoir de problèmes avec cette chaîne de magasins de l’époque que tout le monde a oubliée…! 

Un magasin Prisunic à l’époque.

LE DRAME DU POLITIQUEMENT CORRECT

Il est devenu aujourd’hui impossible de s’exprimer librement –et avec franchise– sans qu’une horde de censeurs n’accoure pour vous taxer de sexisme, de racisme, d’homophobie ou d’antisémitisme le premier qui ose laisser filer la moindre plaisanterie un peu graveleuse sur les femmes, les noirs, les Roms, les homos ou les handicapés est cloué au pilori.

NE DÉPLAIRE A PERSONNE

Le problème avec l’information d’aujourd’hui c’est qu’elle doit passer sous les fourches caudines du politiquement correct qui la déforme et qui ne permet pas de décrire le monde tel qu’il est. Le politiquement correct décide de ce qui doit ou ne doit pas être dit. Il contrôle le langage et indirectement nos pensées.

L’expression « politiquement correct » est apparue aux États-Unis (politically correct) à la fin du XXe siècle, pour dénoncer ou se moquer d’une attitude qui cherche à n’offenser ni dénigrer aucune minorité. Elle est utilisée pour qualifier une façon socialement acceptable de s’exprimer.

En français, le « politiquement correct » est une forme de langage ou de discours normatif qui cherche à ne déplaire à personne, à ne froisser aucune susceptibilité, en particulier dans les groupes ou catégories minoritaires perçues comme désavantagées, et à éviter de faire sentir à quiconque sa différence comme une infériorité ou un motif d’exclusion. Les mots considérés comme offensants ou péjoratifs sont remplacés par d’autres exempts de préjugés et le recours à l’euphémisme, à des périphrases, à des circonlocutions.

Ainsi, amusons nous un peu : les romanichels des Bijoux de la Castafiore seraient par exemple aujourd’hui une « minorité ethnique non sédentarisée » (et le mieux serait de créer un acronyme comme MENS)

Le langage « politiquement correct » (dont les synonymes pourraient être : langue de bois, bien-pensance, conformisme, novlangue, etc.) est utilisé, par exemple, en matière de races, d’ethnies, de cultures, de religions, de sexes, d’infirmités, de classes sociales, de tendances sexuelles…

PETIT FLORILÈGE :

agression : incivilité

aveugle : non-voyant

avortement : interruption volontaire (même si ça ne l’est pas) de grossesse

ballon : référentiel bondissant

bombardement : frappe chirurgicale

bordel : salon de massage

caïd : grand frère

cancre : élève en situation d’échec scolaire

criminalité : insécurité

cancer : longue maladie

coups et blessures : incivilités

se droguer : pratiques à risque

élève : apprenant

envoi de troupes : ingérence humanitaire

verbe : prédicat

immigration : diversité

mariage forcé : tradition

métissage : diversité

mensonge : contre-vérité

pauvreté : exclusion

communautarisme : diversité

nomades : gens du voyage

noir : personne de couleur

obèse : enveloppé

pornographique : au contenu explicite

prison : espace carcéral

relations sexuelles : plaisir

promiscuité : mixité sociale

prostituée : travailleuse du sexe

recherche d’emploi : projet professionnel

migrant : demandeur d’asile

 

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9 commentaires


  1. Merci pour cet article , il faudra bien quand même que la société reprenne ses esprits,que « l’esprit Français » ait de nouveau droit de cité que l’on puisse appeler un chat un chat, arreter de penser que Jean Yanne ,Coluche et Desproges avec lesquels on avait le droit de ne pas être toujours d’accord ne pourraient pas s’exprimer aujourd’hui
    sous peine de procés retentissants ! On doit pouvoir rire de plaisanteries lourdingues tant qu’elles restent des plaisanteries, on doit pouvoir déclarer que l’industrie du spectacle (TV,CINE,Chansons ) fait la part belle aux Juifs sans être taxé d’antisémitisme on doit pouvoir se « moquer  » de telle ou telle religion sans craindre les foudres d’un ayatolha ou nonce apostolique autoinvesti ! Merci pour avoir écrit et publié ce que beaucoup pensent !

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  2. Il est surprenant que vous ayez parfaitement assimilé la définition de politiquement correct et que pourtant vous fassiez l’amalgame avec cette expression « Fatma de Prisunic » qui véhicule clairement un stéréotype dégradant. La façon dont elle est utilisée est humoristique, l’expression en elle-même ne l’est pas. Si vous habitiez un temps en Angleterre et que l’expression « française de trottoir » y était courante, j’imagine que vous feriez en sorte de la faire disparaître. S’il vous plaît, épargnez moi le célèbre « à Rome, on fait comme les romains », j’ai eu l’occasion d’observer maintes fois la communauté française dans divers pays pour en noter l’hypocrisie. Quand à l’esprit français, j’aime à croire qu’il est impertinent mais teinté d’élégance comme celui de Pierre Desproges. Une admiratrice du travail d’Hergé.

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    1. Chère Mina, votre commentaire est justifié mais je pense qu’il faut se remettre dans le contexte de l’époque il y a 60 ans. Il est évident qu’aujourd’hui, si Hergé existait encore il ne lui serait jamais venu à l’esprit d’utiliser une telle expression, c’est un peu comme le nègre Banania qui date de 1915. L’inventeur du Banania, Pierre-François Lardet qui, prolongeant l’idée d’associer patriotisme martial et exotisme colonial, s’est appuyé sur la popularité des tirailleurs sénégalais. Car s’ils sont bien entendu affublés de tous les clichés racistes – ce sont des « êtres inférieurs », de « grands enfants » qui parlent « petit nègre »… -, ils sont aussi considérés comme de véritables héros pour lesquels la population française éprouve une forte sympathie.
      La légende veut que l’un d’eux, blessé et rapatrié du front, ait été embauché à l’usine de Courbevoie où il se serait exclamé « Y’a bon Banania ! » après avoir goûté la célèbre boisson

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      1. Bonjour.
        D’après mes sources:
        L’origine du langage dit « petit nègre » n’est nullement péjoratif. C’est un manuel d’apprentissage rapide du français destiné aux « troupes coloniales » qui ne pratiquaient pas la langue. Comprendre les consignes pendant 14-18 était une affaire de vie ou de mort dans le combat et de discipline aussi. Vu le peu de temps disponible et l’absence de pratique de l’école, les intellos de l’armée ont conçu cette langue expurgée de toutes les difficultés de grammaire, dont les conjugaisons, les COD etc… et cela a fonctionné.
        « y a bon banania » était vraiement un signe de reconnaissance et ce n’est que la stupidité d’ignorants dogmatiques qui en a détourné la signification.
        Heureusement il reste les anciennes publicités pour retrouver la bonne humeur des héros! Paix à leurs âmes.

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    2. Chers Jean-Luc et Mina,

      J’arrive après la bataille mais je suis tombé un peu par hasard et avec bonheur sur votre site internet et la même réflexion que celle de Mina m’est venue.

      Votre travail de remise en contexte est fort intéressante et pertinente, seulement si vous répondez sur la forme, vous éludez le fond, qui fait de ce « Fatima de Prisunic », une expression dégradante, voire raciste.

      Le politiquement correct a en effet pris une place considérable dans notre société, pour le pire parfois mais aussi pour le meilleur dans certains cas. On ne peut ainsi plus entendre en public les horreurs que l’on pouvait entendre dans les années 1930 à propos des Juifs, des immigrés italiens ou polonais, ou encore des Français de l’empire colonial, et c’est mieux ainsi.

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    3. Entièrement d’accord avec vous !
      Mais que voulez-vous, les vieux reacs, homophobes, racistes et machistes ont aussi le droit de s’exprimer, malheureusement….!
      Mais peut-être que certains aimerait vous répondre sans « politiquement correct » que « toi la goudou, tu fermes ta gueule et tu retournes dans ta cuisine ! » Voilà, c’est de ça que le « politiquement correct » nous protège…..monsieur « jean-luc » je ne vous salue pas !

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  3. Merci pour votre réponse, Jean-Luc. J’apprécie l’anecdote car je ne connaissais pas du tout ce sujet. C’est évidemment plein de bon sens de remettre les choses dans leur contexte. Et c’est d’ailleurs pour cela que j’apprécie énormément Hergé qui nous a apporté un univers merveilleux et complexe, qu’il est intéressant de découvrir même s’il y transparaît parfois les défauts et les stéréotypes de son époque. Ces dernières années, il est devenu courant d’entendre et de lire que le politiquement correct nous entoure et rend notre culture « aseptisée ». Il y a de la vérité dans cela mais c’est agaçant de voir beaucoup de personnes se servir de cela pour excuser leur grossièreté, sexisme ou racisme déguisé. J’ai voulu mieux comprendre votre article en sens, mais vous n’étiez pas visé par cette partie du commentaire. Hergé accordait beaucoup d’importance à ses jeunes lecteurs et il a fait en sorte de toujours mettre en valeur les notions de respect. Enfin, j’en profite pour vous remercier pour ce blog admirable!

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    1. Tout à fait d’accord avec vous sur le fait que beaucoup de personnes s’élèvent contre le politiquement correct pour excuser leur grossièreté, sexisme ou racisme déguisé. Merci pour vos remerciements😉

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  4. C’est vrai ! Marre des euphémismes à la con ! Marre d’être affligé de critiques au moindre mot de travers…
    Je vous le dis honnêtement, je suis juif, et franchement, rien n’est antisémite dans tintin contrairement à ce que dit la bien pensance. Même lorsque dans l’étoile mystérieuse, le business man était un juif (Blumentstein), on s’en fout : C’est le reflet de la société de l’époque ! Et puis tant mieux : comme ça, ça montre l’état d’esprit d’époque. Et c’est pas grave.

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