LES VRAIS LIVRES DANS LES AVENTURES DE TINTIN

Tous les Tintinophiles le savent, Hergé, soucieux du détail juste s’est souvent documenté à partir de livres existants pour Les Aventures de Tintin. Dès les premières aventures de Tintin, il s’appuie sur des livres pour décrire les pays traversés par le petit reporter et conférer aux aventures de ce dernier la couleur locale la plus crédible qui soit.

Mais rares sont les livres qu’il a montrés  « visuellement » dans une ou plusieurs cases. J’en ai trouvé seulement 6 qui sont les suivants :

L’ART DE LA MER d’Alexandre BERQMAN

Lorsqu’il encourt, (à propos des dessins de sa Licorne qui paraissent dans le quotidien Le Soir en juin 1942) les reproches taquins de son ami Berqueman,

Hergé connaît fort bien – et pour cause ! – l’ouvrage « L’Art et la Mer » que celui-ci a publié récemment à compte d’auteur : il en a été l’un des tout premiers souscripteurs. Richement illustré, ce vibrant plaidoyer pour la sauvegarde du patrimoine maritime belge n’est sorti de presse que le 20 juin.

 

Soit ! Se dit Hergé. Puisqu’il veut des références plus affirmées, il ne perd rien pour attendre ! Car ce que son correspondant ne pouvait deviner au moment où il s’adressait à lui, c’est que Hergé allait, ce jour-là, interrompre la publication des Aventures extraordinaires de Tintin et Milou, pour cause de maladie. Il profitera donc de sa convalescence pour tenter de satisfaire son ami, visiblement toujours en mal de reconnaissance. La publication du récit reprend son cours normal le jeudi 16 juillet. Dès le lendemain, Alexandre Berqueman découvre dans Le Soir de quoi pavoiser. Non seulement son livre apparaît, bien en vue, parmi d’autres ouvrages de référence, sur la table de son « rival » Sakharine :

GERMAN RESEARCH IN WORLD WAR II de Leslie E.Simon

Dans L’Affaire Tournesol, page 23, lorsque Tintin se trouve dans la maison du professeur Topolino, ils trouvent un livre intitulé German Research in World War II.

Sachez que ce livre (218 pages, environ 23 cm x 17 cm) existe vraiment. Il a été publié en 1947, chez l’éditeur John Wiley and Sons à New York. Dans cet ouvrage, l’auteur, le colonel américain Leslie E. Simon a fait partie d’un groupe de scientifiques qui furent missionnés juste à la fin de la seconde guerre mondiale pour examiner les installations allemandes.

L’ouvrage fait ainsi le point de l’avancée des recherches technologiques allemandes en matière d’armement. Entre autre sur les armes de destruction utilisant les ondes du son à l’aide des projecteurs paraboliques… Ça ne vous rappelle rien ? Les fameux essais de Tournesol dans son laboratoire…

La couverture de l’ouvrage a été scrupuleusement reproduite par Hergé (signalons que dans l’album le livre apparaît dans 9 cases) …

… à l’exception de la croix gammée qui figurait sur l’avion noir. Ce qui lui permit de représenter le cockpit de l’appareil.

L’ASTRONAUTIQUE d’Alexandre Ananoff

Avant de lancer ses personnages vers la Lune, Hergé s’est comme à l’accoutumée procuré toute une documentation spécifique et a même suspendu son projet durant quelques années, tant qu’il ne fut pas convaincu par la vraisemblance du récit. Un livre découvert sur le tard figure parmi ceux qui ont le plus enthousiasmé et servi le dessinateur : L’Astronautique, d’Alexandre Ananoff, un pionnier du voyage spatial en France.

Alexandre Ananoff fut, dès les années trente, le grand spécialiste français de la navigation interplanétaire. En mars 1950, 7 ans avant le lancement du premier Spoutnik, les éditions Fayard publient son livre « L’astronautique » qui va devenir un classique reconnu par la communauté scientifique.

C’est Albert Weinberg, le créateur de Dan Cooper, qui recommande l’ouvrage à Hergé alors qu’il va commencer la nouvelle aventure de Tintin en 1950 : On a marché sur la Lune. L’ouvrage l’enthousiasme. Et il prend alors contact Ananoff qui acceptera de guider les premiers pas sur la lune du père de Tintin.

Pour le remercier et lui rendre hommage, Hergé dessinera son livre bien en évidence sur le coin de la table lors de la séquence ou Tournesol teste, à coups de marteau, la solidité son nouveau casque en plexiglas.

illustration parue en couverture du journal Tintin du 11 mai 1950.

Mais dans l’album couleur (pages 7 et 8) le livre a disparu….

LE TRAITÉ D’ASTRONOMIE de John Herschel 

À la page 4 de On a marché sur la Lune, on découvre que Haddock a dissimulé ses bouteilles de whisky dans un livre-coffret au titre des plus austères : le traité d’astronomie d’un certain John Herschel.

Ce savant a réellement existé et il a écrit un tel ouvrage en 1834.  John Herschel a marqué l’astronomie par la découverte d’une multitude d’étoiles doubles, de nébuleuses et d’amas stellaires. Il est à l’origine du catalogue NGC, référence dans la dénomination des étoiles.

Egalement chimiste, il invente en 1839 le moyen de fixer les images en les immergeant dans un bain d’hyposulfite de soude, composé essentiel des fixateurs en photographie argentique. Il met au point un procédé photographique utilisant du papier recouvert d’une couche photosensible. C’est à lui que l’on doit les termes de négatif et positif.

COKE EN STOCK : JOURNAL TINTIN

Dans le journal Tintin, le 31 octobre 1956, la prépublication de Coke en Stock débute avec un strip dans lequel on voit Nestor au téléphone écoutant d’une oreille plus que distraite les élucubrations de Séraphin Lampion.

J‘ai longtemps pensé que ces 4 cases avaient été supprimées en 1958 lors de la parution en album. Il y avait de quoi le regretter car ce strip nous montre les goûts littéraires de Nestor (rien de moins que « Les Pensées » de Blaise Pascal !) et nous dévoile le nom du film que Tintin et le Capitaine sont allés voir : « Le Justicier de la Pampa »

Mais heureusement, Philippe Goddin nous a expliqué que ce strip n’avait pas été « supprimé » à proprement parler : en réalité, il n’était pas prévu dans ce récit, l’album devant s’ouvrir sur une page « à 3 strips » (sous le bandeau titre). Il serait donc plus juste de dire que ce strip a été « ajouté » pour la prépublication dans le journal Tintin.

L’ÎLE AU TRÉSOR de Stevenson

À la page 43 des Bijoux de la Castafiore, on Tintin voit plongé dans la lecture de cette histoire tandis que Milou fait la sieste à ses pieds, et que Haddock, le pied dans le plâtre, fume la pipe en parcourant un ouvrage de marine.

Rien de surprenant car Hergé avait été marqué par le roman de Stevenson. Tintin fait partie de ces épiques aventures artistiques et humaines comme L’Île au trésor de Stevenson. Il avait découvert le plaisir de la lecture en fouillant la malle d’un grenier familial. Avec L’Île au trésor, Stevenson a laissé derrière lui une œuvre posant non seulement les fondations d’un genre, mais aussi un grand récit d’aventure et d’évasion fondé sur la quête et le rébus.

Hergé ne cachait pas sa fascination pour ce chef- d’œuvre du roman d’aventures qu’il illustra en 1932 pour « Le petit vingtième », supplément jeunesse hebdomadaire du journal belge Le XX » siècle. Interrogé en 1975 sur ses livres préférés, il classait dans l’ordre :

1) Sans famille d’Hector Malot;

2) Robinson Crusoë de Daniel Defoe;

3) L’île au trésor de Stevenson.

Un grand MERCI à Philippe Bertin qui m’a donné l’idée de cette publication lors d’une conversation « tintinesque » entre nous.

 

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6 commentaires


  1. cher Jean-Luc n’as tu pas commis une erreur dans ta date pour objectif lune? tu indiques 1956! ne serait-ce pas plutôt 1950?

    Répondre

    1. Merci Yves de m’avoir (très gentiment) signalé cette faute de frappe😏. C’est corrigé

      Répondre

  2. bonjour,

    ne faudrait-il pas compléter cette liste en ajoutant le « Traité d’Astronomie » de Herschell, publié en 1834 et que le Capitaine Haddock a précieusement emporté un exemplaire dans la fusée ?

    Philippe

    Répondre

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