Les aventures de Tintin… L’œuvre de Hergé a déjà été analysée de cent façons sans qu’on l’épuise, comme toutes les grandes œuvres, pourtant Tintin reste un mystère. Qu’est-ce qui nous touche en lui ? Qu’est-ce qui nous poursuit de façon si insistante jusqu’au fond de l’âge, au point que beaucoup d’écrivains laissent filtrer dans leurs romans ou dans leurs poèmes des allusions à ses aventures, comme on le faisait naguère des héros d’Homère et de Virgile ?

C’est de ce constat et de cette interrogation qu’est née l’idée de ce dossier de la revue Europe. Heureux les auteurs ici conviés à nous faire partager leur Tintin ! Ils ont pu s’abandonner à leur fantaisie sans craindre de déchoir dans l’estime des lecteurs – ou dans la leur. Au contraire, les idées les plus insolites seront portées à leur crédit : dresser un guide de voyage des pays imaginaires parcourus par Tintin… recenser sa bibliothèque ou encenser son chien… lancer de légers ponts tibétains entre l’un ou l’autre de ses compagnons d’aventure et les personnages littéraires qui les ont précédés – ainsi de Séraphin Lampion, résurrection flamboyante de l’illustre Gaudissart gravé à l’eau-forte par Balzac…
ou encore le volcanique général Alcazar par exemple, dirigeant du San Theodoros, lanceur de couteaux, chef guérillero, caudillo, grand fumeur de cigares et grand joueur d’échecs, prototype de tant de généraux d’opérette et de despotes venimeux…
Quatre-vingt-dix ans après sa naissance, trente-cinq ans après sa disparition soudaine dans les sous-sols de la luxueuse villa d’Endaddine Akass à Ischia, l’infatigable reporter nous sollicite encore. Comme l’écrit ici même Jean-Christophe Bailly, le plaisir qu’il y a à lire les aventures de Tintin est « comme une pile qui se rechargerait sans fin ».