LE TRAIN DANS L’OREILLE CASSÉE

Aujourd’hui les courses poursuites ont toujours été un sujet permettant de mettre en scène le train. De plus, si Hergé a offert à Tintin toutes sortes de moyens de transport, c’est souvent sur le quai d’une gare que commencent ses voyages. Dans L’Oreille cassée, on démarre l’action installé confortablement, puis cela se corse. Mais Tintin, en voiture, échappe au choc terrible avec un train à un passage à niveau non gardé en plein altiplano, il ne l’emprunte pas. Il n’a donc pas pris le train… en pleine poitrine !… Hmm ! Ainsi, Tintin poursuivi par l’armée San-Théodorienne, coupe la voie ferrée, juste avant le passage du train, et échappe provisoirement à ses poursuivants.

A remarquer la superbe illustration hors texte dans l’album en noir et blanc de 1937, Hergé l’a admirablement reproduite en y associant l’effet de vitesse par les jets de vapeur et les lignes de fuite.

De cette image, il en existe également une très belle version en couleurs représentée ci-dessus. La locomotive est fascinante, voir la « bête humaine », film de Renoir avec Monsieur Gabin ! Cette locomotive est une 240* « twelve wheel* » inspirée d’une locomotive de la SNCB type 36, modèle très ancien. Pour lui donner un air sud-américain (Caramba !) Hergé l’a affublée d’un pare-bétail classique image des trains du Far-West et les deux écrans de métal ont été enlevés à l’avant. La cheminée surbaissée est caractéristique des années 38 et il ne subsiste plus de cloche.

La forme sera celle de la vapeur jusqu’à la fin de son règne (1970 + en Europe, 1980 en Amérique du Sud); il n’y a pas d’élément existant pour savoir si le fournisseur est Cockerill, Baldwin, ou LIMA **, qui, entre autres, vendit aux français les machines construites en 1945.

La construction sous licence locale est peu probable, la seule société recensée Fiat Materfer / Argentine, pour tout le continent, a été créé en 1958, vingt ans après la sortie de l’album.Il est probable que ce soit en fait une machine d’occasion des pays du Nord, reconditionnée, et munie de son pare buffle qui ferait rêver les possesseurs de 4×4 !!!!

La Pacific Etat : 231G558 du PVC (Pacific Vapeur Club) basée à Sotteville, près de Rouen.

Cette locomotive est du même type que les deux locomotives ayant servi au film « La Bête humaine » (Cliché extrait du site du club.)

Page 58, au port, nous apercevons un wagon dont on en voit si peu qu’il n’est pas identifiable ! Quelque hybride dont Hergé avait le secret (voir le débat sur la localisation de l’île Noire, aboutissant au démembrement du sol, de la construction, du phare, sans parler de l’usufruit et de la nue-propriété !)

*Plusieurs types de locomotives ont un nom par rapport à la disposition des leurs essieux porteurs ou moteurs telle une 231 (un bogie de 2 roues porteuses, 3 roues motrices et une roue porteuse à l’arrière, bissel) se nomme une Pacific, Mountain pour une 241 et Mikado pour une 141 etc. L’appellation Pacific vient du fait que la première locomotive de ce type, livrée par le constructeur américain Baldwin en 1901 pour les New Zealand Railways, fut acheminée à travers l’océan Pacifique dont le nom (Pacific) restera attribué à ces locomotives.. NB : les « Pacific » ont inspiré un fameux morceau de musique à Arthur Honegger « Pacific 231 », rythmé, et auraient favorisé le baby-boom d’après-guerre ! Mais ceci reste à vérifier.

** LIMA, plus tard du groupe Baldwin, fabriqua les machines françaises de l’immédiat après-guerre, les 141 R chauffées au charbon ou au fuel, pour cause de destructions des usines européennes. À ajouter à la liste de ces constructeurs ALCO et Montreal loc. Works.

COCORICO !!! :

André Chapelon, ingénieur français dopa la puissance des machines à vapeur par des prouesses techniques utilisées de 1930 à … 1972 ! André Chapelon a exercé sur la conception des locomotives à vapeur des années 1930 à 1960 une influence aussi forte que celle de George Stephenson un siècle plus tôt, à la naissance des chemins de fer. Les 231 E ont remorqué sur la région Nord le fameux « Flèche d’Or ».

Les ingénieurs britanniques comme Stanier, Gresley, Bulleid, ou Riddles ont appliqué les principes de Chapelon, mais également les ingénieurs belges, espagnols, ou tchécoslovaques.

Sa renommée est même parvenue jusqu’en Amérique du Sud, un des derniers endroits du monde à utiliser la traction vapeur sous la forme de locomotives très modernes jusque dans les années 80.

Texte de Pierre Defrance et Marc Montaigu.

Les images extraites de l’œuvre de Hergé sont la propriété exclusive de MOULINSART SA. © Hergé-Moulinsart 2018.

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Un commentaire


  1. Jean-Michel Petit aurait sûrement aimé cet article.

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