ARSÈNE LEMEY : LE LETTREUR DE HERGÉ

 

Le lettrage en bande dessinée est un élément important. En effet, le dessin des lettres va orienter la lecture dans un sens ou dans un autre. Un lettrage orné, très maîtrisé, aura une signification, donnera au texte de la case une personnalité différente d’un lettrage relâché ou d’apparence nonchalante. La grande majorité des bandes dessinées aujourd’hui utilisent des typographies informatisée. C’est une pratique qui économise du temps, de l’argent et du savoir-faire,  mais qui a tendance à uniformiser le marché Le lettrage à la main offrait une liberté au créateur et lui permettait d’avoir un outil incomparable pour donner de la vie à sa bande dessinée. Hergé avait son « Lettreur ». C’était Arsène Lemey

Arsène Lemey est né le 7 juillet 1930 près de Courtrai. De 1946 à 1953, il suit les cours de graphisme de la section Art et Décoration de l’école Saint Luc à Tournai (les Écoles Saint Luc étaient des instituts fondés par les Frères des Écoles Chrétiennes qui dispensaient des formations graphiques et architecturales. Hergé fit d’ailleurs un bref passage dans les cours du soir de celle de Saint Gilles  à l’automne 1925). Présenté par l’un de ses profes­seurs, le Frère Michel, à Charles Lesnes, directeur du département édition de Casterman, Arsène réalise quelques esquisses de couverture pour Casterman au début des années cinquante.

En 1951, l’éditeur de Tintin lui demande de réaliser, comme job d’étudiant, le lettrage des albums de Hergé (phylactères, onomatopées et titres).

La grande saga typographique Arsénienne commence par le lettrage du Secret de la Licorne en Allemand. Cet album est le premier d’une longue série puisque notre gentleman polyglotte réalisera le lettrage des albums de Hergé dans sept langues : français, néerlandais, anglais, allemand, italien, espagnol et portugais.

Arsène recevait de Hergé les textes dactylographiés avec une numérotation correspondant aux cases des planches.

Son travail de bénédictin commençait alors. Pour la petite histoire, au début des années cinquante, le lettrage de la pré-publication dans le journal Tintin était confié au lettreur des éditions du LOMBARD, les albums Casterman demeurant la chasse gardée d’Arsène. En 1953 le gentleman lettreur, fraîchement sorti de Saint-Luc, est appelé sous les drapeaux pour un service de 18 mois dans l’infanterie à Soest en Allemagne… Comme il avait de la voix et jouait de l’orgue, il fut nommé ordonnance du major-aumonier Verslyppe qui mit à sa disposition un bureau, ce qui lui permit de poursuivre sa collaboration avec Hergé. Arsène réalisa ainsi, en service commandé pour la patrie, le lettrage de On a marché sur la Lune ! De 1955 à 57, Arsène travaille à domicile, rémunéré à la page comme indépendant, pour Hergé et d’autres dont Jacques Martin (Alix, Lefranc) et Craenhals (Pom et Teddy).

Ajoutons que le graphisme n’a plus de secret pour Arsène qui est aussi précis dans les dessins techniques, les planches d’anatomie et autres graphismes publicitaires, que dans la typographie hergéenne ! En 1957, il est engagé à plein temps chez Casterman. Le nom de la police de caractères créée par Arsène pour Hergé est l’ARLESON de AR = Arsène; LE = Lemey; SON = fils en anglais. ARLESON est donc le fils d’Arsène. Cet alphabet a été digéré par une photocomposeuse chez Casterman, ce qui permet, depuis 1975, de réaliser le lettrage des albums de Hergé sans passer par le fastidieux travail manuel d’encrage. Ce fut le cas des albums de Hergé en anglais, allemand, italien, espagnol et portu­gais. Les albums en français et en néerlandais quant à eux demeurent cal­ligraphiés par les doigts d’Arsène.

 

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