Germaine Kieckens est née en 1906. En 1928, elle est engagée comme secrétaire par l’abbé Wallez, qui est le Directeur du journal « Le XXème Siècle » dont le supplément pour la jeunesse « Le Petit Vingtième » a pour rédacteur en chef Hergé.
C’est le mercredi 20 juillet 1932, à Bruxelles (la cérémonie a lieu en l’église Saint Roch) que cette rousse énergique se marie avec Hergé.
L’Abbé Wallez a d’ailleurs accepté de bénir leur union. Georges porte pour l’occasion un smoking avec nœud papillon blanc sous un col cassé et un chapeau Haut-de-forme. Son frère Paul Remi, militaire de carrière est en uniforme de Brigadier de Cavalerie.
Tout au long des 24 ans de leur vie commune, Germaine sera la collaboratrice attentive de son mari, et jouera un rôle déterminant dans sa carrière. Elle a partagé avec lui les années décisives de la création de Tintin, le soutenant alors que ce dernier était accablé de travail, l’épaulant même dans des tâches ingrates : retouches, lettrages, mise au noir, etc. Et elle l’a aussi beaucoup soutenu dans ses moments de dépression. En 1956, Hergé entame une liaison avec une jeune coloriste des studios : Fanny Vlaminck. Il lui faudra 4 ans pour quitter Germaine et encore 17 (à cause de la loi belge) pour obtenir le divorce en 1977. Jusqu’à la fin de ces jours, Hergé continuera de retrouver, une fois par semaine, dans leur villa de Céroux-Mousty, celle qui restera à jamais la Hergée de Hergé (Georges avait en effet surnommé son épouse Hergée, ce qui en dit long sur leur complicité).
Il est une influence plus importante encore, quoique plus impalpable, qu’exerça Germaine sur l’art d’Hergé. Germaine, ou plutôt le corps de Germaine, lequel fut souvent dessiné par Georges dans des scènes de la vie quotidienne ou, exceptionnellement, par exemple en mai 1933, dans le plus simple appareil, quand elle finissait par accepter de jouer les modèles pour Georges qui jamais auparavant n’en avait « croqué ». Elle fut comme le souligne Pierre Assouline « son principal modèle, avec leurs chats. Allongée ou assise, le plus souvent habillée mais parfois nue »
Sanguine de 1935, ce rarissime dessin de Hergé est empreint d’une sensualité jusqu’alors inconnue.
Ayant toujours préféré l’anonymat, Germaine Kieckens consentait très rarement à parler de sa vie avec Hergé. Voici quelques extraits de ses rares interviews.
« Georges faisait des caricatures. C’est l’abbé Wallez qui l’a incité à créer un personnage, un adolescent avec un petit chien, et à lui faire faire des voyages. C’est ainsi que tout a commencé. Sinon Georges aurait continué à faire des illustrations et des titres….
… Il lisait beaucoup. Pourquoi a-t-il appelé le chien Milou? Je ne pourrais pas le dire. D’ailleurs Georges n’aimait pas les chiens. En revanche, il adorait les chats; à une certaine époque, on en a eu dix….
… C’est moi qui ai inventé le nom de Haddock. Nous mangions de l’églefin fumé, du haddock. Quand Hergé a demandé comment on allait nommer le capitaine, c’était tout de suite trouvé. Quant aux Dupont et Dupond, c’était son père Alexis et son oncle Léon, deux inséparables…
Il aimait aussi la peinture moderne et les belles voitures rapides. Il roulait toujours très vite. Nous avons eu un accident avec la Lancia. Depuis lors, je marche avec une canne. »
Hergé a, à de nombreuses reprises, caricaturé son épouse dans les aventures de Tintin.
Dans cette vignette du Sceptre D’ottokar, elle figure entre Hergé et le frère de ce dernier : Paul Remi
Germaine Kieckens est décédée le 26 octobre 1995 à l’âge de 89 ans
Ci-dessous, en vidéo, le témoignage de Germaine, © Extrait de l’excellent documentaire de Benoît Peeters
MONSIEUR HERGÉ (1989),
pour lancer la vidéo, cliquez sur l’image.
Émouvante lettre adressée par Hergé à Germaine, lors d’une phase dépressive de ce dernier :
« …Il me fallait toutes ces souffrances pour savoir à quel point je t’étais attaché ; pour savoir aussi quelle femme admirable tu étais ; pour comprendre toutes tes délicatesses et pour mesurer toute l’ampleur de ton amour ; pour réaliser à quel point je t’étais redevable de l’oeuvre que j’ai faite, car sans cesse tu t’es effacée, et même sacrifiée, pour me permettre de me consacrer entièrement à ce que je faisais. Toutes les petites joies, toutes les petites satisfactions qu’une femme est en droit d’attendre, tu me les as offertes, pour ne pas me distraire de mon travail. N’as-tu pas aussi refoulé en toi ce besoin, cette soif de l’enfant que toute femme porte en elle ? Ne m’as-tu pas, là aussi, mis en premier lieu et n’as-tu pas pensé, avant tout, à ma paix et, par conséquent, à mon travail ?… »
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Permaliens
Permaliens
J’ai bien connu un psychiatre qui a eu Hergé comme patient. À l’époque, il m’a dit que les idées narratives des albums de Tintin
provenaient largement de l’imagination de son épouse de sorte que son rôle à lui étaient de les mettre en image. Les albums de Tintin sont en réalité le résultat de la collaboration de deux auteurs Hergé et Germain Kieckens.